Le Génome et après ?

http://www.cnrs.fr/cw/fr/tous/manif/sciecito2001.htm

Le séquençage des génomes marque l'aboutissement d'une démarche analytique débutée il y a 25 ans, utilisant les outils de la Biologie Moléculaire pour analyser et caractériser ces briques constitutives du vivant que représentent les gènes et leurs produits: les protéines. Ce faisant, il annonce dès maintenant un renouveau conceptuel considérable au sein des Sciences du Vivant. En effet, à peine terminé, le décryptage du génome fait apparaître les limites du succès de l'analyse réductionniste : la seule connaissance des composants des systèmes vivants ne permet pas de comprendre les fonctions et les interactions complexes qui régissent les organismes. Déjà, les résultats actuels nous entraînent irrémédiablement vers une génomique fonctionnelle, systémique, qui appréhende de manière intégrative le fonctionnement des gènes et leur rôle tant au niveau biologique qu'au niveau comportemental.

Le renouveau conceptuel : Les gènes et les fonctions.

Pour conduire cette évolution, la rigueur sémantique doit être rétablie en reconsidérant nombre de métaphores largement utilisées tant au sein de la discipline que dans les messages émis à l'attention du grand public. En particulier, l'élégante métaphore de programme génétique fondée sur l'ambiguïté sémantique d'une déclaration du type "les gènes déterminent quels types de protéines seront fabriquées par les cellules" se réfère uniquement au code génétique (c'est-à-dire à la relation -mécanismes de synthèse- entre la séquence des bases de l'ADN et de son transcrit). Toutefois, celle-ci laisse faussement à penser le génome comme une série d'instructions (un programme) réglant l'organisation (moléculaire, cellulaire, tissulaire, comportementale…) des systèmes vivants. D'autres métaphores comme celle de "livre de la vie" pour le génome, de "mots" pour les gènes, etc. ont pu suggérer que la seule connaissance de la séquence du génome (c'est-à-dire l'enchaînement des bases A, T, G, C) fournirait un accès rapide à l'intelligibilité du vivant. En fait, le séquençage des génomes a permis de prendre la mesure de la complexité des organismes tant sur le plan structural que fonctionnel. Aussi, de nouvelles hypothèses sont nécessaires pour expliquer, d'une part, les différences phénotypiques entre les individus d'une même espèce alors que leurs génomes sont identiques à plus de 99,9% ou, inversement, des génomes de tailles semblables (même contenu en gènes) pour des espèces très différentes (l'homme et la souris, par exemple) ; l'interprétation physico-chimique classique : un gène B un polypeptide) s'avère insuffisante pour décrire la diversité et de la complexité observée.

Aujourd'hui, le gène perd sa place centrale au profit de modèles plus complexes de réseaux dynamiques visant à rendre compte du fonctionnement normal et pathologique des systèmes biologiques. Le gène ne doit plus être pris comme un élément isolé mais comme un composant d'un système doté de propriétés surprenantes : la même fonction peut être réalisée par des assemblages de gènes différents (redondance), le même gène peut jouer des rôles différents suivant le contexte physiologique dans lequel il s'exprime ; de sorte qu' une fonction ne peut être réduite à la somme des composants qui la réalisent.

Il est à prévoir que cette nouvelle conception du gène (dont la définition mérite une discussion à part entière ; désormais, qu'est-ce qu'un gène?) n'est pas sans incidences tant sur le plan des idées que sur des aspects aussi divers qu'essentiels de notre vie quotidienne.

Outre les aspects liés à la définition du concept de gène revisité à la faveur du séquençage des génomes, les points suivants seront discutés :

Le séquençage a permis aux biologistes d'identifier 1,4 million de SNP (single nucleotide polymorphism), ces variations dans l'agencement des trois milliards de nucléotides qui composent l' ADN humain, pourraient expliquer la vulnérabilité plus grande de certains individus à des maladies comme le cancer ou le diabète.

Comment traiter ces informations? Ou cela nous mène-t-il? Quels effets anxiogènes d'une médecine prédictive trop performante?

OGM : Quel discours? quelles réalités ?

Comment est interprété le discours sur les OGM ? ce discours est-il adapté ? Ne peut-on trouver de nouveaux éclairages pour comprendre les réactions parfois brutales des consommateurs "pressentis" ? Au lieu d'asséner aujourd'hui des savoirs démentis le lendemain, ne conviendrait-il pas de former à l'incertain, d'informer sur le doute? le risque ?

Propriété industrielle et brevets sur les gènes : Le nécessaire et les possibles.

Les dispositions législatives et réglementaires en vigueur autorisent la prise de brevets sur les gènes animaux, végétaux ou humains. La désignation d'un large domaine d'exploitation (système nerveux, cardio-vasculaires…) préempte toutes les applications spécifiques futures liées aux propriétés multifonctionnelles des gènes (notamment chez l'homme). Ceci fait craindre un ralentissement de la diffusion des résultats au préjudice des progrès de la recherche. Quelles évolutions compatibles avec les stratégies de développement des entreprises peuvent être envisagées ? Risques pour biodiversité, pays en développement, coût des médicaments (Afrique du Sud)