97
Table Ronde

9.2.C

Mardi 10 Juin

16h15-18h
Le travail social à l'épreuve de l'indécidable

Animation :

B. TRICOIRE (KAIROS, Nantes)
Contributions préparées

C. BATIME

(Institut du Développement Social, Rouen)
" Ecoute organisationnelle et veille coopérative... "

D. PAPINEAU

(IDAMS, Poitiers)

" La synthèse : rituel sacrificiel du dilemme ? "

J. PUYO

(IDAMS, Poitiers)

" L'arbitraire de la décision comme ruse de l'indécidabilité "

P. RABILLER

(Centre hospitalier spécialisé, Nantes)
" Le danger comme (dis)-solution du risque "

J. RICHARD

(IDAMS, Poitiers)
" La protection de l'enfance passe-t-elle par l'infantilisation du citoyen ? "

A. TACHÉ

(U. des Sciences Sociales, Toulouse)
" La Médiaction, une conjonction possible du faire et du savoir au cœur du processus de la décision en situation complexe "



B. TRICOIRE

(Kairos, Nantes)
" Prendre en charge la question du tiers, à condition de ne jamais se risquer à la poser "
Notes

Le travail social à l'épreuve de l'indécidable
9.2
Ecoute organisationnelle et veille coopérative....

C. BATIME Institut du Développement Social, Rouen

C

Mardi 10 Juin, 16h15-18h


Dans un organisme de formation professionnelle chargé de contribuer à la co-construction des compétences de futurs travailleurs sociaux, comment rechercher des " moteurs d'adaptation " qui permettraient de tendre vers une organisation qui serait un système ouvert apprenant et capable d'apprentissage, attentif et capable de gérer cette attention , réactif, et plus fortement coopératif ?

Les travailleurs sociaux à " former " dans différents métiers opérent dans un contexte complexe, instable, fortement évolutif où ils devront coopérer ; ils devront s'insérer dans un jeu où les interactions sont essentielles et où les règles du jeu surdéterminantes appartiennent à une logique de type économique asservissant le social ; dans un jeu où la régulation ne provient pas d' orientations nationales clairement affirmées en termes de politique sociale ; dans un espace territorial où les logiques politiques se superposent et où les acteurs privés et publics ont vocation à intervenir pour et avec des usagers qui se trouvent à des stades divers d'exclusion et de " disqualification sociale ".

Un centre de formation conscient de ce contexte et de ce défi doit, pour répondre à sa mission de qualification , aller au delà de la transmission des repères professionnels et de l'information-structure, de la valorisation du savoir-être, et de la référence aux valeurs. Il doit apprendre aux futurs professionnels à apprendre, à développer leur attention, à s' informer, à coopérer, à pratiquer l'art du questionnement et du savoir relier ce qui est délié afin de créer du sens ou de nouvelles potentialités d'action ...

Pour cela, il faut que l' équipe pédagogique et l'organisation formatrice dans son ensemble soient au coeur de ce processus, qu'elle l'incorpore . Parmi les moyens diversifiés utilisés, il a été mis en place au sein d'une mission Prospective un " Tableau de veille coopératif " .

Il s'agit de considérer que l' " attention organisationnelle est une ressource auto-organisatrice " (S. Amabile) pour un Institut chargé de conduire un système de qualification.

Chacun des membres de l'organisation, de par son positionnement institutionnel, de par les projets qu'il mène, de par les approches pluridisciplinaires qui sont les siennes, de par les réseaux auxquels il participe, est dans une situation singulière d'observation. Il s'agit de la rendre consciente et interactive, et de faire en sorte que le capteur s'engage comme sujet dans le signal qu'il choisit de capter comme significatif et porteur de changement . Ces observations lorqu'elles sont reconnues comme tel , formalisées dans un même espace, croisées et interprétées régulièrement selon différents points de vue, permettent de se représenter les environnements de l'action sociale, de développer une écoute productive, d'anticiper et de s'adapter, et de promouvoir des décisions (choix pédagogiques, nouveaux positionnements institutionnels, etc ...) dans lesquelles le moment du choix ne serait pas survalorisé, mais qui seraient enracinées dans un processus écologique.

Cette démarche révèle des jeux d'acteurs contradictoires, et un espace d'interface où se joue en tension le passage entre une organisation composée d'acteurs juxtaposés et une organisation comme système vivant capable d'apprentissage, d'intelligence collective, démontrant que le tout est plus que la somme des parties, et que l'on peut transformer de l'information en organisation et en formation .


97
Rencontres MCX 6 - Poitiers, Futuroscope, 9 et 10 Juin 1997


Le travail social à l'épreuve de l'indécidable
La synthèse : rituel sacrificiel du dilemme ?

D. PAPINEAUPAPINEAU

Institut départemental d'actions médico-sociales IDAMS, Poitiers

9.2

C

Mardi 10 Juin, 16h15-18h


Qu'est-ce qu'une synthèse? C'est une tentative de décision en situation complexe. C'est une manière de faire une mise en commun des savoirs pour parvenir à mieux faire. La synthèse se construit sous l'apparence du "principe de la somme" pour mieux utiliser "le principe de totalité". Elle est à la fois additive, soustractive et supplétive. Si elle est censée faire loi, la synthèse est avant tout "méta". Elle est un acte d'identité individuelle ou institutionnelle, unidualité dans laquelle l'ordre est invoqué, tenté, et tout à la fois repoussé, le plus souvent. La synthèse est vouée à conclure sur une connaissance commune arrêtant temporairement le temps. La synthèse produit un savoir sur un ignorant, ou supposé tel (objet d'étude, sujet d'inquiétude), et ignore tout de son savoir.

Mais aussi, la synthèse est une entreprise rituelle, technique d'apaisement cathartique, adaptée à fonctionner en dehors des périodes de crises aiguës, par son rôle préventif. La synthèse fonctionne comme un rite à la force centrifuge qui extirpe la violence des membres et la projette sur l'extérieur constitué en objet / sujet de la rencontre. Elle participe à une recherche de l'indemne, de la pureté originelle, fantasme du groupe institutionnel, d'une thèse sainte. La synthèse est l'outil prédominant de la formation mythique institutionnelle d'une vérité objective et distanciatrice, invoquant le schisme inaliénable entre l'intérieur et l'extérieur. Dans cette construction de l'indemne, elle échoue.

La synthèse échoue dans sa constitution de l'indemne pour plusieurs raisons:

- il se trouve toujours un participant pour ne pas participer,

- le dernier mot est impossible dans sa définition même,

- par son absence ou sa multiplicité, la conclusion est annulée,

- une synthèse véritable est unique et il en faut pourtant souvent plusieurs,

- le Travailleur Social ne peut se résoudre à l'indemne là où il est convié à être garant du dilemme.

Deux modèles de la synthèse s'affrontent, un modèle technique et un modèle humain:

* l'expert travaille pour l'indemne et définit une indemnisation à verser à une victime non consentante. Son apport est extérieur à lui: indemnisation. Le risque est exogène, il doit être

évité ou compensé.

* le généraliste Travailleur Social est saisi par / se saisit du dilemme et se constitue en tiers face

à une victime consentante. Son apport est constitutif, c'est lui-même, le tiers. Le risque est

endogène, il doit être assumé par la médiation du tiers.

Là où la synthèse échoue dans sa tâche à conclure et à servir l'indemne (pureté originelle supposée, objectivité, unicité) elle réussit dans sa finalité de maintenir le dilemme et d'en répondre (dilemme humain, indécidabilité, rituel). L'efficacité paradoxale de la synthèse constitue son effectivité. La synthèse est une violence moindre pour une violence pire, elle "prend les devants" pour "protéger ses arrières". Elle est rite expiatoire et ne peut être efficiente qu'en s'en tenant à sa puissance symbolique. Elle maintient l'identité du système intervenant en consacrant l'indécidabilité et le dilemme.


97
Rencontres MCX 6 - Poitiers, Futuroscope, 9 et 10 Juin 1997


Le travail social à l'épreuve de l'indécidable
9.2
L'arbitraire de la décision comme ruse de l'indécidabilité

J. PUYO IDAMS, Poitiers

C

Mardi 10 Juin, 16h15-18h


La situation complexe est un construit humain, point de vue (emplacement/opinion) immergé dans un contexte (ensemble de logiques disjointes et niveaux conjoints et inversement) dont émerge potentiellement une production de sens comme l'aurait sans doute suggéré Monsieur Yves Barel. La décision marque une rupture en même temps qu'elle maintient un lien et son intelligence nous convie à distinguer/relier deux niveaux: (1) elle est catalyseur de complexité par sa simplicité qui marque une rupture/liaison; la simplicité du "faire" et le respect d'une certaine continuité entre l'acteur et son milieu deviennent des opérateurs de complexité (2) elle est agent de simplification dans la mesure où elle est un choix parmi les alternatives possibles. La décision est le problème et la solution provisoire du problème, comme à la fois maîtrise de l'incertitude et incertitude.

Elle crée de la "réalité" sous une double propriété: une propriété d'actualisation, factuelle (quelque chose se passe) et une propriété potentielle, forme de non-événement qui constitue cette "réalité" et y est agissante. Cette double forme peut apparaître comme "cause" et "remède", ces deux niveaux se superposent ; rappelant étrangement les figures relationnelles du "bourreau et de la victime" (RenéRené Girard), elle prend le risque de produire des formes d'exclusion sous le sceau de la rationalité et de son opérationnalité (économique / social ; exemple : Renault Vilvorde).

L'arbitraire de la décision, dans le contexte paradoxal de la justice (elle est à la fois juste et injuste, les deux parties en présence pouvant estimer que cette décision n'est pas suffisamment juste suivant la représentation auto-référentielle du préjudice subi) contient ses effets réducteur et catalyseur de complexité en même temps qu'il produit un effet cathartique dans l'entre-deux des intérêts individuels et collectif et de leur production de violence. L'arbitraire de la décision judiciaire remplit une fonction de "médiation" par sa solennité (référence au sacré) et par le fait que nous consentions (rapport au sacré) à la potentielle injustice de sa justice rendue.

L'hologramme de la décision est en proie à la récursivité de ses apories : (1) forme de simplification par son actualisation, elle potentialise ses effets de complexification et inversement (2) sa production n'atténue en rien "l'incertitude principielle" : facteur de mouvement et d'immobilité, la décision intensifie l'indécidabilité qu'elle se propose de maîtriser. Ainsi, l'arbitraire de la décision prend l'apparence du simple dans la complexité, mais la ruse de l'indécidabilité a le génie de faire agir le doute au sein de la maîtrise de l'indécidabilité, sans détruire celle-ci. L'indécidabilité commande de ne pas être aveugle quant à sa maîtrise par la décision, les effets et rétroactions à celle-ci redoublant le paradoxe des formes de décidabilité et d'indécidabilité.

L'illusion de la "bonne" décision pourrait se proposer de maîtriser une fois pour toutes cette indécidabilité, mais ce serait tenter d'échapper aux doubles contraintes (dilemmes) dans lesquelles les différents acteurs sont pris, sachant qu'une décision se sature, et qu'il s'agit de la faire travailler et de ne pas s'y laisser prendre, en devenir l'otage (cf. paradoxe de la protection de l'enfance qui ne peut exercer ses pouvoirs qu'avec l'adhésion de ceux à qui ils s'imposent).

S'il faut se fier à la décision et à son indécidabilité, et dans le même mouvement la mettre en doute, on peut les faire travailler à partir de deux impératifs "éthique et esthétique" (H.V. Foerster) :

- "agir de façon à multiplier les alternatives possibles" ;

- "si tu veux voir, apprends à agir", et nous ajouterons: agir envers les autres comme nous

souhaiterions qu'ils agissent envers nous.


97
Rencontres MCX 6 - Poitiers, Futuroscope, 9 et 10 Juin 1997


Le travail social à l'épreuve de l'indécidable
Le danger comme dis-solution du risque

P. RABILLER Centre hospitalier spécialisé, Nantes

9.2

C

Mardi 10 Juin, 16h15-18h


Les conduites dites à risques sont de l'acte - passage, ou passé actualisé -, du faire qui sollicite le développement de savoirs susceptibles de leur donner sens alors même qu'elles sont perçues sans raison, si ce n'est sans enjeux par leur auteur comme par leur observateur. Faire et savoir semblent alors se présenter dissociés et répartis entre l'un et l'autre dans un dilemme rendant problématique leur intelligibilité.

L'un, ça peut être tout sujet, conducteur automobile, sportif, séducteur comme aussi bien joueur à la roulette, toxicomane, suicidant, voire fumeur. L'autre, ça peut être le spécialiste, promu expert en la circonstance - le psychiatre nommément - que la société convoque pour des tâches impossibles: d'une part produire un pronostic savant appuyé sur la statistique épidémiologique, une fois le sujet à risques assigné à une place repérée selon une catégorie (le diagnostic qu'il soit D.S.M. ou C.I.M.) d'autre part inter - venir pour que cesse le scandale de la jouissance d'une mise à mort programmée. Celui là donc est sommé de trouver à des questions mal posées les bonnes réponses (conférer les "bonnes pratiques médicales") qui supposent la certitude d'un savoir maîtrisé, réduisant l'altérité à rien.

Pour le sujet qui a décidé de s'affronter de façon répétitive à un danger vital non maîtrisé, il se place dans un rapport de probabilité qui associe la certitude de la menace pour l'intégrité de son être, et l'incertitude quant à l'actualisation immédiate de ce danger. C'est justement dans cette part laissée au hasard que se situe l'originalité de telles conduites. Le hasard prend là la figure du destin pour un sujet qui tente par ce biais de "faire de son existence un destin" (cf. A. Malraux in "les voies du silence").

Le risque de mort est supposé, voire même posé, pour donner sens à la vie, ce qui permet de définir ces conduites comme ordaliques (cf. C. Nicolas et Valeur). Le sujet par sa survie se prouve sa valeur, qui à défaut d'être reconnue par l'autre, sera reconnue par la puissance transcendante du destin, par Dieu tout aussi bien. La confrontation à une limite ultime représentée par Dieu , réintroduit un tiers idéalisé auquel le sujet se fie, le laissant décider de son droit à la vie ou de la possibilité de sa mort. L'acte fonctionne alors comme jugement de sa propre existence tout en réinterpellant un tiers susceptible d'inscrire le sujet dans l'ordre symbolique. Cette carence d'inscription se trouve être le lieu du risque social, quand la distanciation des liens, tant dans le pôle familial que dans le pôle professionnel, laisse les sujets dans le défaut d'une relation d'appartenance étayante nécessaire à la constitution d'une identité stable. (rappelons à cet égard les origines du mot risque: rhiza, en grec, la racine. Desecare, en latin, couper).

Pour en finir avec ses questions existentielles portant sur identité, appartenance et références, le sujet qui s'affronte au risque supposé vient se mettre sous la domination du danger constitué (rappelons là que le mot danger est un terme issu du droit féodal où "être en danger" équivaut à être sous la domination, sous la puissance). La mise en jeu destructive du corps peut également évoquer l'addiction dans son acception initiale de "faire don de son corps" pour honorer une dette, symbolique en l'occasion.

La mise en danger effective marque un passage par la limite qui établit dans le même temps la solution "de sortie" du risque et sa dissolution. A partir de là, du côté de l'intervenant, le risque est grand à vouloir contrôler à tout prix les risques pris par le sujet, de le précipiter dans le danger, marque paradoxale de son autonomie. Peut être reste t-il possible en face de ces registres particuliers du faire, de proposer des lieux et des temps fiables où face à un tiers qui aurait renoncé à la maîtrise, puissent venir s'inscrire des savoirs singuliers du sujet articulés à et articulant ses propres questions.


97
Rencontres MCX 6 - Poitiers, Futuroscope, 9 et 10 Juin 1997

Le travail social à l'épreuve de l'indécidable
9.2
La protection de l'enfance passe-t-elle par l'infantilisation du citoyen ?

J. RICHARD IDAMS, Poitiers

C

Mardi 10 Juin, 16h15-18h


Sur un fond sociétal de vacuité des transcendances s'érige la statue de l'enfant martyr comme figure emblématique de la victime, à travers laquelle semble se reconnaître la sensibilité contemporaine, vouée au culte des innocents et à la vénération du héros ordinaire, celui qui n'y est pour rien dans ce qui le grandit.

La cause désormais prioritaire de l'enfant qui exige son lot de coupables, ne va pas sans susciter des vocations purificatrices avec leurs cortèges d'intégrisme simplificateurs et de fantasmes de transparence où se côtoient exigence de réparation et esprit de vengeance dans un "angélisme exterminateur" (G. Slama) qui confine à la chasse ancestrale du bouc émissaire.

L'enfant, devenu la réserve écologique de l'homme corrompu, apparaît comme l'agneau rédempteur d'un monde qui prospère par le massacre économique des innocents, le spectacle victimaire devenant la condition transfigurée du sacrifice réel des laissés pour compte qui consacre la loi du plus fort (loi commune du marché et de l'abuseur) et le cousinage secret (et tabou) des violences privées et collectives (cf. "L'horreur économique").

La protection de l'enfant, par quoi la société rentabilise symboliquement sa dette aux plus faibles, aboutit à l'invention paradoxale des "droits de l'homme de l'enfant" où la coupure de la minorité est à la fois niée et reconduite dans un mouvement perpétuel et oscillant de particularisation de l'universel et d'universalisation du particulier. Cette manipulation juridique produit l'émergence de "pseudo-droits" (I. Théry) sans garantie et sans responsabilité caractéristiques d'une future para-citoyenneté préparant l'avènement d'un sujet du 3ème type, à la fois enfant-citoyen et citoyen-infantile, prototype de l'individu contemporain exposé aux délices conjugués de la "tentation de l'innocence" (P. Bruckner) et du "crépuscule du devoir" (G. Lipovetsky).

Dans une conception qui assujettit l'autorité des parents au remboursement de leur créance à l'égard de l'enfant, les adultes, enrôlés dans le cercle vertueux du partenariat, en sont réduits à une pratique honteuse de leurs droits devenus encombrants et contre-productifs, au regard de la technique consensuelle de la conduite de projet, "machine célibataire" (J. Baudrillard) produisant des combinatoires opérationnelles auto-légitimantes et précipitant dès lors le déclin du droit par l'instrumentalisation de la Justice, inféodée aux protocoles de l'action et désormais contaminée par la recherche pragmatique de la solution.

Sur fond de systémique opératoire, la solution qui arrange remplace la décision qui relie (dans la mesure où l'on n'est relié que par ce qui nous dépasse), le diktat du projet supplante le respect des procédures, la logique de la "faisabilité" tenant lieu de légitimité sous les auspices auto-référents de la médiation qui instaure un petit monde sans altérité construit par les techniques de l'accord où les cartes biseautées de la négociation relèvent bien souvent du compromis réconciliateur du "tous-moins-un".

La citoyenneté de l'enfant et l'infantilisation du citroyen s'auto-engendrent dans le laboratoire de la protection par le procès de leur croissante in-différenciation, qui prélude à leur prochaine indifférence mutuelle dans une société "incestuante" qui brouille les frontières signifiantes, abrogeant par-là même les conditions de production du sens et minant les fondements de l'état de droit.


97
Rencontres MCX 6 - Poitiers, Futuroscope, 9 et 10 Juin 1997


Le travail social à l'épreuve de l'indécidable
La Médiaction, une conjonction possible du faire et du savoir au coeur du processus de la décision en situation complexe

A. TACHÉ U. des Sciences Sociales, Toulouse

9.2

C

Mardi 10 Juin, 16h15-18h


Quelles articulations entre faire et savoir peut-on, sur le chemin de la prise de décision en situation complexe, envisager ?

Quelles conjonctions entre théorie et pratique, entre agir et réflechir peut-on construire qui permettent le mouvement d'émergence de la prise de décision ?

Comment répondre à l'exigence conceptuelle et opérationnelle de la complexité lors de la prise de décision ?

La politique de l'emploi (ses mesures et dispositifs, ses outils) se propose de réguler le phénomène à la fois social, politique, économique... qu'est le chômage.

Dans l'appréhension et la représentation de ce phénomène, on peut repérer et ce depuis les années 70, que les conceptions les plus communes et dominantes sont articulées " au discours de la méthode " cartésien et à la logique binaire de causalité linéaire. Dualisme et monisme ont présidé et président encore à la construction de la politique de l'emploi et de ses outils (administrations, mesures d'aide, dispositifs de formation...). Ces constructions sont d'autant plus imposantes que jusqu'à une période récente elles excluaient de fait toute autre solution et mettaient au pilori les analyses qui apparaissaient comme dissonantes.

Force est de constater que les formes traditionnelles de régulation articulées à ce modèle ne sont plus suffisantes pour le règlement des problèmes. En effet, ces formes de régulation ont toujours ceci en commun qu'elles opposent les parties entre elles (parties d'un tout qui est le phénomène, parties en présence au sens des acteurs en présence) et la " sanction " qui va du réajustement des outils par rapport aux objectifs à l'exclusion d'une des parties (de leur représentant) est toujours de type disjonctif, exclusif : à qui la faute ? Qui est responsable ? Questions qui développent une conception univoque de la causalité.

Il est peut-être possible de développer des conceptions de pratiques (des savoir de faire) qui servent de " passeur " entre des temps, formes, espaces de disjonction (qui sont sans doute nécessaire à certains moments) et des temps formes espaces de conjonction.

Des conceptions de pratiques permettant une lecture critique et plurielle qui ne se satisfasse pas des schématismes simplifiants, qui respecte mieux la complexité du phénomène.

Nous proposons au travers d'un terrain d'expérience, celui de la mise en oeuvre et du développement de la politique de l'emploi ainsi que d'une pratique professionnelle, celle d'un psychosociologue auprès des acteurs de la formation-insertion, d'illustrer et d'interroger le concept et la pratique de Médiaction. Concept et pratique qu'il est nécessaire d'interroger d'un point de vue épistémologique. Nous nous appuyerons sur des exemples concrets issus de la pratique professionnelle.


97
Rencontres MCX 6 - Poitiers, Futuroscope, 9 et 10 Juin 1997

Le travail social à l'épreuve de l'indécidable
9.2
Prendre en charge la question du tiers, à condition de ne jamais se risquer à la poser

B. TRICOIRE Kairos, Nantes

C

Mardi 10 Juin, 16h15-18h


" ... il faut n'avoir jamais travaillé", ironise B. LATOUR, pour ignorer les secrètes alchimies du savoir et du faire et les risques de leurs mélanges: tantôt trouvailles étonnantes, tantôt combinaisons détonnantes ...

comme spontanément ajustées aux exclusions anthropologiques, les "coupures épistémologiques" ont voulu avoir raison de ce désordre, et en supprimer les risques par les voies de la désignation catégorielle (le Katégorikos: l'accusateur) et de l'assignation à résidence, conceptuelle ici, existentielle là, bref par l'ex - propriation.

Via l'éviction qui le nomme au procès violent de sa destitution ou l'assimile au programme euphémisé de son insertion, le TIERS est bien le TEMOIN EMPECHE DE PARLER, exclu attitré de notre logique et de notre anthropologie ordinaires. "Optimisé" donc, s'agissant de coupler le meilleur rendement à la dépense minimale, et TOUTES CHARGES COMPRISES, c'est - à - dire déduction faite de l'élément soustrait à l'unité rationnelle et communautaire (le "ratio", l'"affect ratial" (D. SIBONY), le "moins un" réconciliateur).

L'important (ce qui compte, ce qui rend raison, ce qui réunit ...) est de faire proprement le travail dans le geste compulsif de BLANCHIMENT DE LA VIOLENCE: retour à la pureté originelle (impliquant purification (t).echnique ou "indemnisation"), envol vers un avenir radieux (impliquant sacrifices).

Saisi dans la tourmente, le Travail Social est le "témoin" d'un mouvement pendulaire de "Grand Horloger", aux prises avec la "finalité sans fin" des DILEMMES de l'autonomie et du contrôle, du savoir et du faire, de la morale et de l'éthique, du droit et de l'obligation. D'où son statut d'INDECIDABLE, qui lui fait en quelque sorte obligation de comprendre tout ... "de travers" et d'agir au dépourvu. "... en faisant plus et autre chose que ce qu'il est censé faire." (Y. BAREL).

Mais si "le concept est royal, divin, héroïque, c'est - à - dire victimaire." (M. SERRES), son absence ou sa défaillance durable augurent toujours le pire! Tel est le paradoxe de l'inter - venant: comment peut-il résister à l'ensemble des RENONCEMENTS AUX EPREUVES DU DILEMME, c'est - à - dire accepter d'être déssaisi de la bonne réponse dans l'immanence à une situation qui épuise les savoirs?

Une "Ethique des situations" (A. BADIOU) suppose un renoncement actif à la maîtrise dans la FIDELITE A CE QUI NOUS ECHAPPE, rien moins que l'ALTERITE irréductible de l'événement et de sa marque subjectivée. Loin de s'entendre par un retrait nihiliste, cette fidélité prescrit moins de répondre que de REPONDRE DE LA QUESTION DE NOS REPONSES, autrement dit de ne pas manquer à notre parole. Aux confluences du sens se joue le sort du tiers, témoin exclu - empêché de parler pour que la cause commune soit entendue, témoin (r) - appelé pour qu'une parole passe dans le don indécidable de la confiance.


97
Rencontres MCX 6 - Poitiers, Futuroscope, 9 et 10 Juin 1997


Retour Index | Retour Index AE-MCX | Retour Home-Page RED&S