Un document du programme européen M.C.X./A.P.C.
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Résolument complexe, la question du paysage se voit aujourdhui partagée entre des domaines dactivités techniques et intellectuels que peu de choses unissent en apparence. Aussi, au fur et à mesure que cette notion progresse dans les esprits, son contenu véritable semble vouloir échapper aux questionnements dune seule et même discipline.
Indéniablement, la multiplicité des approches, la transdisciplinarité tend à simposer à ceux qui - chercheurs ou praticiens - acceptent aujourdhui de prendre part à une réflexion pour les paysages de demain. Déjà des expériences innovantes voient le jour ça et là et nous autorisent à imaginer de nouveaux outils dappréhension, à penser autrement les stratégies daménagement, là où le spécialiste et le technicien régnaient en maître jusqualors. Démocratie participative ou de proximité, la contribution du géomètre, du géographe, du paysagiste et du sociologue ne sen trouve pas pour autant remise en cause. Au contraire dirons-nous, il devrait être du ressort de ces derniers de comprendre et de traduire les besoins dune société, dun groupe social en quête de fonctionnalité mais aussi et surtout de mémoire et didentité à travers le sens de son environnement.
Toutefois, il demeure des efforts à fournir et des énergies à lier ou à relier pour que les acteurs multiples dun projet localement planifié ne soient pas inhibés dans leur démarche par linfranchissable barrière qui sépare leurs disciplines respectives. A la base de toutes réflexions et projets consensuels de paysage, des efforts sont parfois anéantis faute de ne pas sêtre donné les moyens - ou de ne pas sêtre offert le temps - de confronter les acceptions individuelles du terme paysage en vue de létablissement dun champ sémantique partagé.
La polysémique du concept est probablement le premier obstacle à surmonter, pour nous y aider Gabriel ROUGERIE et Nicolas BEROUTCHACHVILI ont - en 1991 - conçu comme un outil méthodologique un ouvrage pédagogique dont la consultation préalable semble à même de nous prémunir dune éventuelle déroute...
GÉOSYSTEMES ET PAYSAGES
Bilan et méthode
Gabriel Rougerie et Nicolas Beroutchachvili apportent en effet à lissu de leur ouvrage GÉOSYSTEMES ET PAYSAGES un regard synthétique sur ce que recouvre - dans le temps et dans lespace - la notion de paysage.
En préalable, les co-auteurs de ce quasi-manuel tentent de cerner lhistorique du paysage en tant que construction culturelle, puis en tant que représentation sociale dépendante dune réalité géographique. Or cest bien là que réside toute la complexité de cette notion ambivalente : la subjectivité de notre représentation du lieu précède-t-elle la réalité physique objective à laquelle elle se rattache ? A nous de prendre part à cette réflexion ni totalement biocentrique ni définitivement anthropocentrique. Simplement, Gabriel Rougerie et Nicolas Beroutchachvili nous aident - à travers leur discours - à saisir combien il nétait pas possible de prendre part au débat actuel tout en faisant léconomie de lhistoire des idées relatives à lémergence de ce débat...
En premier lieu, il nous est chroniquement présenté un certain nombre dhypothèses et affirmations concernant limmiscions dun sens nouveau dans notre culture, à savoir, celui du sens paysager.
Ensuite, cette première partie laisse place à un état des lieux concernant la place quoccupe le paysage et son étude dans la géographie contemporaine. Il est dabord question de la géographie physique, non seulement française mais aussi soviétique (louvrage date de 1991), allemande (y compris celle de lancienne RDA) et tchécoslovaque. Il nous apparaît ainsi que les ex-soviétiques furent les premiers à formuler un concept parent de celui décosystème, il sagit bien entendu du fameux géosystème dont lusage échappe en grande partie - pour lheure - aux praticiens de la géographie humaine. La géographie humaine, pour sa part, semble seule à poser lessentiel des questionnements heuristiques, sémiologiques ou herméneutiques ayant retenu lattention de nos auteurs.
Enfin, ces derniers font état dun certain nombre dapproches et danalyses du paysage-objet, du paysage-perçu et - afin de réconcilier géographie physique et humaine, - tracent le chemin dune certaine approche synoptique. Ces regards pluriels portés sur lappréhension du paysage - quil soit menacé, existant ou à construire - ouvrent, de manière pragmatique, sur des stratégies daménagement dores et déjà exploitées notamment lors de la mise en place des chartes de paysage.
Stéphane Daupley.