A 12
Evelyne ANDREEWSKY : Métaphores de
la cognition et modes de raisonnement
aristotéliciens
Les racines lointaines des sciences de la
cognition
26 XII 04
METAPHORES DE LA COGNITION
ET MODES DE RAISONNEMENT ARISTOTELICIENS
EVELYNE ANDREEWSKY
9, rue de la Cité Universitaire, 75014 PARIS
Résumé
Comment concevons-nous les phénomènes cognitifs, comme penser ou raisonner ? Il y a 25 siècles, en Grèce, la façon la plus noble de raisonner - à savoir la logique - a été intensément étudiée, et a présidé à toute l'histoire du progrès scientifique. A l'heure actuelle, dans la mesure où la logique est pour ainsi dire incarnée dans les ordinateurs, les sciences cognitives sont d'une certaine manière les héritières de ces approches du raisonnement. On peut en effet observer des analogies entre les principales métaphores de ces sciences récentes, ancrées comme on le sait dans l’informatique, et les trois modes de raisonnement aristotéliciens (à savoir, déduction, induction et rétroduction (ou “abduction”)) :
- “Penser, c'est computer” – la métaphore classique de l’ordinateur - est d'une certaine manière fille (ou petite-fille) de la déduction, avec notamment les “ raisonnements ” tels que les pratiquent les systèmes experts, en termes de “ si … alors ” ;
- “Penser est une propriété émergeante du fonctionnement des réseaux de neurones”, la métaphore “ cerveau ” et son paradigme connexioniste, s’apparente à l’induction, dans la mesure où cette dernière, à l’instar de ce paradigme, établit ses lois à partir de faits, autrement dit, d’exemples ;
- La cognition n’est autre que le processus même de la vie, avec les “auto” (auto-organisation, autopoïese, etc.). Une telle approche qui implique une “ invention récurrente du soi et de la réalité ” ne paraît pas totalement étrangère à l'abduction.
On insistera sur ce 3° aspect, le plus intéressant à la fois dans sa généralité et sa complexité ; en effet, l'abduction (cf. Peirce) est un processus créatif complexe, nullement cantonné aux découvertes scientifiques, mais au contraire mis en œuvre dans la vie de tous les jours, et tout particulièrement en matière de langage. On présentera quelques phénomènes cognitifs reflétant cette dimension créative, dimension que l'on observe aussi, mais en creux, en Intelligence Artificielle, dans les difficultés des "traitements automatiques du langage naturel" comme par exemple la traduction.