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Antoine BARRIERE: Théorie de l’Evolution et complexité : quelques réflexions sur la place de la phylogénèse dans la psychologie humaine

28 janvier 2005

Théorie de l’Evolution et complexité :

quelques réflexions sur la place de la phylogenèse dans la psychologie humaine

Antoine BARRIERE

Psychiatre, thérapeute familial

4, boulevard de la Cascade 91260 JUVISY sur Orge

antoine.barriere@wanadoo.fr

La théorie de l’évolution rend compte efficacement de nombreuses propriétés de la vie et de sa diversité. Comme toute théorie scientifique elle suscite des ajustements voire des remises en cause, ainsi le niveau auquel opère la sélection naturelle est-il objet de controverses : est-ce au niveau du gène (théorie du gène égoïste) ? Du groupe ? De l’individu ? De l’espèce ?

Actuellement la théorie du gène égoïste semble rendre mieux compte des faits bien que la sélection groupale garde encore des arguments pertinents. De même la nature de la sélection reste encore sujet à discussion : sélection uniquement positive (le plus adapté est sélectionné)? Sélection neutre et donc basée sur un ensemble de variations neutres et équivalentes avec élimination des moins adaptés ? Là aussi, bien que la sélection positive semble être capable de rendre compte au mieux des observations, la sélection neutre/négative garde une place.

Ainsi, sans faire référence à l’être humain, il semblerait que la théorie de l’évolution ne soit pas un paradigme unificateur de la compréhension du vivant et qu’il est sûrement nécessaire d’accepter de faire coexister des niveaux de sélections  différents et éventuellement conflictuels. Le passage à l’homme moderne amène une question supplémentaire : cognition, langage et culture peuvent ils être expliqués par le paradigme général de la théorie de l’évolution ? Les réponses sont variées mais de deux ordres:

P. Tort avec son principe « d’effet réversif de l’évolution » pense que l’évolution a autorisé l’émergence de la culture qui- elle- s’est affranchie des lois de l’évolution catapultant ainsi l’humanité dans un nouvel univers régit par ses propres règles téléologiques, ce principe est congruent avec la plupart des courants sociologiques contemporains ainsi qu’avec les théories du fonctionnement psychique psychanalytiques.

R. Dawkin a quant à lui postulé que la culture humaine restait tributaire du principe ultime de l’évolution : réplication/survie du gène et que la culture était basée sur un principe général de réplication/multiplication/sélection et ne serait donc qu’un outil destiné à la réplication des gènes.

Pourtant l’examen de certains faits montre que les paradigmes du « tout émergent » et du « tout sélectif »  ne suffisent pas à créer un paradigme général rendant compte des mécanismes de propres à l’homme. Ainsi, la nécessité de reconnaître que nous n’avons que des paradigmes locaux se fait sentir, et que nous ne pouvons que tenter de créer des cartes locales où parfois plusieurs paradigmes contradictoires entre eux seront pourtant nécessaires pour rendre compte au mieux des phénomènes observés. Cette démarche complexe sera illustrée à partir de données issues d’observations cliniques psychiatriques et psychologiques : le comportement d’attachement, la schizophrénie et l’anorexie mentale.