Rédigée par D. Violet sur l'ouvrage de LERBET Georges : |
« Pédagogie et systémique » 1997, Paris, PUF, Collection Pédagogues et Pédagogies, 128 pages. |
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Depuis près de trente ans, Georges Lerbet contribue, à sa manière, à la critique des conceptualisations et des pratiques en éducation. Si l'on en juge par les contenus de ses travaux antérieurs, l'auteur, qui connaît bien l'oeuvre de Jean Piaget, a su prolonger la psychologie du développement cognitif jusqu'aux sciences de l'autonomie, de la complexité et des systèmes. Ainsi, comme pour creuser davantage le sillon esquissé par ses deux ouvrages précédents (Bio-cognition, formation et alternance, 1995, Paris, L'Harmattan ; Les Nouvelles Sciences de l'éducation, 1995, Paris, Nathan), G. Lerbet nous entra"ne ici à distinguer les paradigmes qui servent apparemment de référence aux diverses méthodologies éducatives actuelles.
De par leur intention transdisciplinaire, les Sciences de l'Education s'inspirent plus ou moins explicitement des initiatives genevoises de Piaget. Dans cet esprit, les colloques genevois peuvent être perçu comme l'aube des sciences de l'éducation. En revanche, depuis une vingtaine d'années, de nombreux travaux fondamentalement pluridisciplinaires, s'annoncent quasiment comme un crépuscule de cette discipline invisible. En effet, si les SE sont seulement un agglomérat de psychologie, de sociologie, de philosophie, ... alors leur pertinence scientifique devient effectivement discutable.
Pris dans cette tourmente aliénante, et l'on comprend facilement pourquoi,
il aura fallu de longues années et probablement certains concours
de circonstance, pour que Lerbet et son école tourangelle trouvent
la place qu'ils méritent dans le paysage de l'éducation. Cette
école, que l'on peut facilement reconnaître comme celle de la
modélisation systémique en pédagogie, ne pouvait
effectivement voir émerger sa légitimité scientifique
qu'avec un véritable cadrage épistémologique. Ce cadrage,
que J-L. Le Moigne appelait de toutes ses forces, ne pouvait manifestement
pas se limiter à une épistémologie disciplinaire. En
effet, si les SE, plus exactement les NSE (Nouvelles Sciences de l'Education),
sont véritablement transdisciplinaires, alors leurs finalités
scientifiques méritent d'être appréhendées au
niveau du DED (Domaine Epistémologique Dérivé, cf. J.
Piaget, 1967). Ces finalités, clairement énoncées par
G. Lerbet consistent à construire des modèles heuristiques
permettant de comprendre, et non d'expliquer, les processus de cognition
et/ou de communication qui participent de la complexité des situations
pédagogiques. Ainsi, en acceptant délibérément
l'incomplétude et la pensée paradoxale, les NSE intègrent
pleinement le paradigme systémique.
Ce petit livre se propose donc de clarifier les positions paradigmatiques des sciences de l'éducation dans le domaine pédagogique. En quarante-huit pages, très exactement, G. Lerbet, avec sa rigueur et sa fougue intellectuelle habituelles, nous entra"ne dans un véritable sprint épistémologique. Les soixante-dix-huit pages suivantes, composées de onze textes extraits d'ouvrages qui convergent vers un regard systémique, maintiennent le lecteur sur la piste de la pensée complexe. Tout cela contribue à donner à cet ouvrage un aspect cardinal et à l'entrevoir comme un véritable plaidoyer pour une pédagogie constructiviste, systémique et paradoxale.
D. Violet
Fiche mise en ligne le 12/02/2003