Modélisation de la CompleXité
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"Modélisation de la CompleXité"

Association pour la Pensée Complexe
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Note de lecture

Rédigée par JLM sur l'ouvrage de ENGEL Pascal :
« La norme du vrai. Philosophe de la logique »
     Ed. Gallimard. NRF Essais. Paris 1989, 412 p.

"Par "logique" j'entendrai, au sens courant, la théorie des inférences valides en vertu de leur forme. On admet en général que cette définition ne s'applique qu'à la logique déductive et que la théorie des inférences inductives ne fait pas partie de la logique proprement dite...

La question de savoir pourquoi il en est ainsi est en elle même très intéressante, mais on ne peut espérer y répondre que si l'on a au préalable une idée claire de ce qu'est la logique de référence, c'est d dire la logique déductive. Celle-ci pose déjà des problèmes suffisamment complexes pour qu'on laisse de côté ceux que pose la logique inductive." (p. Vll).

Cette conception de la logique, certes très largement partagée par tous les logiciens contemporains, qu'ils soient mathématicien ou philosophes, ne risque pas de nous livrer beaucoup de règles fructueuses pour bien conduire notre raison si elle nous garantit de bien gérer les raisonnements syllogistiques (et ceux-là seulement). Une logique qui non seulement réduit le raisonnement à la vérification formelle ("la norme du vrai") mais surtout lui interdit l'exploration de l'invention, la connaissance du nouveau, la richesse de l'ouverture de l'esprit et de sa capacité à conjoindre des symboles.

L'essai de P. Engel nous vaut un exposé remarquable de cette logique déductive formelle telle qu'on peut la décrire et l'interpréter académiquement à la fin du vingtième siècle. Qui se plaindra de voir la philosophie se ré-approprier la logique après la longue annexion (un siècle !) que la mathématique avait réussie grâce à l'intervention de Russel et Whitehead ? Mais faut-il pour autant que la philosophie se résigne à ne plus explorer l'ineffable et mystérieux complexe de "la Vérité". En concluant qu'est "vrai" un énoncé "conforme aux normes d'une logique formelle déductive" laquelle n'est pourtant pas "la loi d'une quelconque réalité" ne défigure-t-on pas dramatiquement les significations de la Vérité ? Si c'est la logique qui définit le vrai et non plus la quête du vrai qui légitime le raisonnement "logique", ne sacralisons-nous pas à notre insu un système de règles bien arbitraires et souvent fort contre-intuitives ("La loi du tiers exclu - est - elle "vraiment" - simplement (sic) une généralisation de l'expérience universelle selon laquelle certains états mentaux sont destructeurs d'autres états" ? : fonnule de Bain, dans "Logic" 1843 citée page 375. Cette expérience est-elle "vraiment" universelle ?

La logique déductive s'avère décidément bien contraignante dès lors que l'on veut l'imposer au nom de "sa capacité à seule dire le vrai". Après avoir argué en concluant que "la logique n'est pas partisane : elle ne nous engage à adopter aucune ontologie particulière" (p. 415) P.  Engeldevra ajouter, sans percevoir la "contradiction" de ce propos : "Les conventions que nous adoptons sont contraintes par une réalité qui existe indépendamment de nous. En ce sens j'a idéfendu une conception réaliste de la nature de la logique" (p. 416). Remercions le de sa probité, et demandons lui comment "la logique", dès lors, peut être neutre, indépendante de toute ontologie. Si "une règle logique est l'énoncé des principes directeurs qu'un agent doit suivre s'il est rationnel" (p. 418), ne sommes nous pas dramatiquement contraints par ces logiciens partisans (comme chacun de nous) dès lors que nous voulons nous comporter de façon rationnelle ("bien conduire sa raison") : n'est-il pas d'autres règles pertinentes que celles de la logique déductives pour "bien raisonner" ? Aristote au secours, les syllogisticiens reviennent !

Fiche mise en ligne le 12/02/2003


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