Rédigée par JLM sur l'ouvrage de SAGE P. Andrew (Ed.) : |
« Concise Encyclopedia of InformationProcessing in Systems and Organizations » Pergamon Press - Oxford, 1990. |
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L'audience de la grande encyplopedie (en 8 volumes) consacrée aux "systèmes et à leur commande" ("Systèmes & Control") (chez Pergamon) sous la direction du Pr. M.G. Singh, a incité l'éditeur à produire des volumes plus spécialisés et moins volumineux ; le dossier consacré aux "Systèmes de traitement de l'information dans les organisations" (sous la direction du Pr. A.P. Sage), devient ainsi la référence de tous les enseignants et de tous les ingénieurs ayant à intervenir dans ces domaines au long de la décennie quatre vingt dix. Au moins (et sans doute au plus !) dans les communautés anglo-saxonnes ! Car 90 % des spécialistes sollicités sont Nord-Américains et la méconnaissance des travaux issus des autres cultures est complète. Effet pervers classique de la langue dominante lorsqu'on l'utilise sans attention.
Les quelques soixante dix articles qui construisent cette encyclopédie sont certes d'une facture correcte. Sous le titre retenu, on lit à peu près ce qui s'enseigne aujourd'hui dans une université moyenne Nord-Américaine. Ce mérite n'est pas mince, et on peut parier que cette encyclopédie "concise" rendra service aux innombrables jeunes enseignants qui ont et qui auront à préparer des cours dans ces domaines ! Mais ce résultat "minimum" aurait pu - et je crois aurait du - être complété par deux autres bénéfiques que l'on devrait trouver en acquérant ce recueil :
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C'est la première fois, je crois, qu'un volume encyclopédique était consacré spécifiquement aux systèmes d'information organisationnels. L'occasion de mettre en valeur l'unité et la cohérence interne de ce nouveau champ disciplinaire, qui n'a pris son autonomie que depuis un quart de siècle, était sans doute trop belle, et A.P. Sage l'a laissé passer. L'architecture en onze blocs par laquelle il propose de caractériser le domaine tient de l'empilement de cubes et ne révèle aucune cohérence interne : on pourrait sans doute en échanger deux, et substituer à un bloc un chapitre élaboré ailleurs (sur les sciences de l'organisation par exemple), sans que le lecteur perçoive une transformation du domaine. Les quelques 2 000 "sujets" que recense l'index thématique final sont, à de rares exceptions près cité une seule fois (et, lorsqu'ils le sont plusieurs fois, ils renvoient souvent au même article !). Nous sommes bien en présence d'une juxtaposition, et l'effort pour mettre en valeur les quelques cinquante concepts fortement fédérateurs par lesquels se défini aujourd'hui la discipline n'est pas même esquissé. On paye ici chèrement le prix de l'inattention épistémologique que l'on observe si fréquemment dans l'enseignement et la recherche en sciences de l'ingénierie. Le message insistant qu'H.A. Simon adressait en 1969 aux enseignants du M.I.T. (la prestigieuse université des sciences de l'ingénierie du Massachusett) n'est toujours pas entendu vingt ans après (dans "The sciences of the Artificiel").
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Ce "déficit épistémologique" est d'autant plus surprenant que la culture scientifique anglo-saxonne a produit, depuis un demi-siècle, l'essentiel de la "théorie" des systèmes d'information organisationnels... alors que les articles de cette encyclopédie semblent l'ignorer ! Si au lieu de rassembler des textes de seconde main, l'éditeur avait repris quelques-uns des principaux textes de A. Newell et H.A. Simon, sur les thèmes "Systèmes, Information, Organisation, Décision, Cognition" pour ne mentionner que les plus incontestés, il nous aurait livré un recueil solidement architecturé, permettant une articulation dynamique des concepts théoriques et des interprétations pratiques. Alors qu'à quelques rares exceptions près (pour la plupart anecdotiques), les soixante auteursde ce volume les ignorent. D'obscurs auteurs de manuels Nord-Américains sont souvent cités, (sans doute par application du principe du renvoi de l'ascenseur ?), alors que A. Newell et H.A. Simon semblent ne pas avoir contribué à la construction de la discipline. L'éditeur, A.P. Sage semble avoir perçu cette faiblesse : il rédigera à lui seul vingt des quelques soixante articles, en s'efforçant de mettre en valeur les caractéristiques cognitives et décisionnelles des systèmes d'information. Mais il le fera de façon souvent trop "prudente" en réduisant trop les questions à leur aspect technique,comme s'il craignait de se faire traiter de théoricien !... Et il n'aura pas l'audace de faire retravailler ses auteurs pour les inciter à articuler leurs contributions (le concept de "rationalité limitée" par exemple est présenté indépendamment et partiellement par plusieurs articles, sans que l'on puisse disposer de l'un des textes par lesquels H.A.Simon l'a construit et discuté).
Ajoutons que cette encyclopédie n'a pas de sommaire paginé (ce qui complique les recherches) ni d'index des auteurs cités (ce qui ne permet pas de repérer les sources communes).
Et convenons volontiers que dans ces domaines en permanent renouvellement, "si la critique est aisée, l'art est difficile !... Il reste aux usagers de cette encyclopédie à méditer sur ce que pourront être ses prochaines éditions : la jeune discipline des systèmes d'information organisationnels progresse par tâtonnements et par essais-erreurs. N'est-ce pas rassurant ?
Fiche mise en ligne le 12/02/2003