Rédigée par JLM sur l'ouvrage de MALLET Jeanne : |
« Ethique et Education, défi pour un nouveau millénaire » Ed. Oméga-Formation, 2003, ISBN 2.910747 02 6, 94 pages. |
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Le propose de ce petit livre s’entend par son sous titre : « A partir d’un entretien avec le Dalaï Lama » : Riche de sa longue expérience d’enseignante et de formatrice de formateurs (à l’Université de Provence), Jeanne Mallet s’interroge depuis longtemps sur cet étrange ‘métier’, et elle a trouvé dans les écrits et les conférences du Dalaï lama , infatigable intellectuel et sage missionnaire d’une éducation qui ne sépare plus le développement du développement affectif, bien des réflexions qu’elle souhaite approfondir.
L’occasion d’un entretien avec le Dalaï Lama à Dahramsala en avril 2001 lui a permis de catalyser ce processus : Son essai s’ouvre par ce titre paradoxalement provocant : Comment se fait il que la question des dimensions éthiques de tout enseignement et de toute éducation soit si encore rarement posée dans sa banale naïveté, et renvoyée le plus souvent aux institutions religieuses ou au cours d’instruction civique ? L’essai nous décrit ses méditations sur ce thème dans les contextes ou elle les a poursuivies, des écoles des jeunes tibétains en exil en Inde, aux questions qu’elle et ses proches collègues rencontrent dans « leur expérience d’enseignants et d’éducateurs ».
Contextes qui mettent bien en valeur les deux chapitres qui reprennent les termes de son entretien avec la Dalaî Lama, très attentif au caractère civilisateur des systèmes d’enseignement et à la difficulté permanente du maintien du respect de l’autre et de la reconnaissance ‘la chaleur humaine’ qui devrait être au cœur de tout acte éducatif (et plus généralement, bien sûr, de toute relation entre les humains : « Il nous faut de la ‘chalume’ » disait, chaleureusement Edgar Morin dans une de ses conférences ! Entretien qu’elle documente de son mieux en reprenant quelques pages particulièrement significatives des écrits du 14° Dalaï Lama et des auteurs français contemporains qui se sont intéressés aux ‘Dialogues du Bouddhisme et des Sciences’.
Sympathique occasion de revenir sur ces questions généreuses que les institutions ont tendance à refouler, craignant qu’elles ne suscitent plus de conflits que de sérénité : Même la déclaration des Droits Humains faillit être bannie de l’école laïque en France il y a peu, sous le prétexte qu’elle relevait d’une idéologie partisane dite « du droitdel’hommisme » !
Pourtant il serait sage de s’interroger aujourd’hui sur le caractère auto poïétique plutôt que mimétique de l’acte éducatif ? Sa légitimité éthique est-elle vraiment platonicienne, délivrée par « les prêtres et les prêtresses qui ont reçu des dieux ce savoir divin » ? Ou est elle sans cesse reconstruite dans et par les interactions des formateurs et des formés qui, formés forment leurs formateurs ? La question n’est pas aisée à poser, et on comprend que J Mallet s’arrête avant, effrayée par la complexité de l’enjeu dans nos cultures si imprégnée de Platonicisme. Je ne vois que quelques expériences des volontaires d’ATD-Quart Monde, attentifs à la connaissance générée dans l’interaction par les plus démunis, pour nous aider aujourd’hui à relever empiriquement, en tâtonnant ce véritable défi [1] . : « Personne n’éduque autrui, personne ne s’éduque tout seul. Les hommes et les femmes s’éduquent ensemble par l’intermédiaire du monde »(p. 198). Peut être aussi la riche méditation d’Edgar Morin sur « l’éthique de la compréhension », qui est peut être une des clefs essentielle de notre intelligence des rapport de l’Ethique et de l’Education, si nous convenons que le cœur de l’acte d’Apprendre est la passion de Comprendre ? (« Travailler à bien penser, voilà le source de la morale » : La formule de Pascal nous dit peut-être l’essentiel des rapports de l’éthique et de l’éducation : non pas un platonicien ‘bien penser’, mais un pragmatique ‘travailler à bien penser’) Peut-on parler d’éthique de l’éducation lorsque il s’agit d’éduquer « à appliquer le règlement, (ou la recette), sans chercher à comprendre ? » En assumant ce défi avec modestie et enthousiasme à la fois, J. Mallet nous incite à y « faire attention ». Remercions là de son initiative,
JLM.
[1] Je renvoie à nouveau à « Le croisement des savoirs » (1999) et « Le croisement des pratiques »(2002), editions ATD Quart-Monde
Fiche mise en ligne le 06/05/2003