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- Jean CLENET : Complexité de La Formation et Formation à La Complexité : Concevoir et Construire des Systèmes Intelligents et Intelligibles

7 -12 –2004

 COMPLEXITE DE LA FORMATION ET FORMATION A LA COMPLEXITE :

Concevoir et construire des systèmes intelligents et intelligibles

Clénet Jean

jean.clenet@univ-lille1.fr

Professeur des Universités,

Directeur du département des sciences de l’éducation Laboratoire trigone, CUEEP, Lille1.

Appréhender la complexité en formation(s) versus formation à la complexité, devient un formidable enjeu pour les sciences de l’éducation et de la formation. A la suite du Grand Atelier de Lille 2003, nous avons pu constater l’immensité des efforts consentis par des concepteurs de formations, tous engagés dans une quête de renouvellements expérientiels, pédagogiques, ingénieriques, conceptuels et épistémologiques, dans les formations dont ils ont la responsabilité et ce, quelque soit le niveau de leurs interventions. L’ensemble de ces travaux a produit un sens nouveau à travers des conceptions qui visent à penser l’éducation-formation, pas seulement comme un objet à transmettre, mais davantage « comme processus de construction propre à des sujets et/ou à des organisations, en situations ». Nous voilà alors confrontés à des conceptions complexes de la formation.

1-      La formation entendue comme « une construction singulière des sujets » qui se traduit par l’émergence de formes propres finalisées, situées, mais reconnaissables.

2-      La formation entendue comme « systèmes artificiels », autrement dit, quelle sera la nature et les « effets » des systèmes conçus-construits-conduits par les ingénieurs ?

3-      La formation entendue comme « formes d’intelligibilités renouvelées »,  c’est-à-dire les conceptions des acteurs « pensant et faisant la formation ».

La complexité ici déclinée consiste à dépasser les formes traditionnelles qui trop souvent « écrasent » ces trois niveaux et s’évertue à appliquer des modèles déjà-là, dont la pertinence reste à montrer, notamment dès lors qu’il s’agit de penser la formation dans le cadre de ses usages socio-professionnels (peut-il en être autrement ?) : par et pour des processus d’engagement, d’intégration et de transformations personnelles ou organisationnelles.

Elle consiste également à penser la formation dans une double hélice entrelaçant complexité de la formation et formation à la complexité. Ces deux expressions ne peuvent aller l’une sans l’autre. D’une part, elles sont complémentaires, si l’on prétend complexifier les regards et les pratiques à la fois des concepteurs et des apprenants confrontés à des situations complexes ; d’autre part, elles sont anti-parallèles, c’est-à-dire naturellement enchevêtrées et en interactions fortes.

Les travaux du Grand Atelier de Lille nous renseignent sur un point majeur : on prend toujours des risques importants quand les modèles proposés dans le domaine de la formation : pédagogies, ingénieries, recherches, s'éloignent des phénomènes liés au "vivant", c'est-à-dire des Hommes. Cela peut être observé quand les artefacts (systèmes de formations) pourtant conçus par des Hommes, même avec les meilleures intentions, en desservent d'autres plus qu'ils ne les servent. Souvent, ces systèmes artificiels[1]ne conviennent plus, en sombrant parfois dans les artifices de la complication. Ils ne sont plus à même de respecter la complexité propre aux systèmes vivants, aux situations et aux Hommes en particulier. Dans le domaine de la formation, la conception de systèmes ouverts, rendus convenables et pertinents, mais jamais idéaux ni définitifs, relève de formes d’ingénieries sociales, de formations et pédagogiques, reliantes, respectueuses et sensibles. Il s’agit alors d’inventer ce qui convient humainement et localement, pour le rendre pertinent et reconnaissable socialement.


[1] En référence aux travaux de H. Simon, Sciences des systèmes, sciences de l’artificiel, Reéd. 2004.