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« POUR UNE ÉCOLOGIE DU TRAVAIL HUMAIN
Travail et emploi : divorce ou mutation ? »
par ADAM Michel Ed l’Harmattan, 2008, ISBN : 978-2-296-05554-4 • • 270 pages |
Ndlr. Le nouvel ouvrage de notre ami Michel ADAM nous semble si bienvenu aujourd’hui que nous avons lui avons demandé l’autorisation de reprendre ici deux riches textes de présentation de « ce livre passionnant » : La Préface de Hugues Sibille, ancien délégué interministériel à l’Innovation sociale, et la Postface de France Joubert, Fondateur du dialogue social territorial, Président du Centre Européen de Ressources des Groupements d’Employeurs : Deux témoignages riches d’experience qui nous donneront envie d’entendre l’écologie du travail humain au cœur de toute Politique de Civilisation. Suivant le conseil d’Edgar Morin, ‘distinguant ce qui était confondu et reliant ce qui était séparé’ , Michel Adam nous invite à former ‘le projet d'une écologie du travail humain fondée dans une reconstruction du travail, objet vital et complexe, univers de sens, et de l'emploi, univers de l'équité recherchée, et de leur entrelacement. Le travail est malade de l'emploi, de nouveaux remèdes s'imposent pour supprimer le chômage de longue durée.’
Nous remercions vivement l’auteur, le préfacier, le postfacier et leur éditeur de leur autorisation.
On trouvera donc ci-dessous successivement : La Préface de Hugues Sibille, et la Postface de France Joubert, la présentation du livre « Pour une écologie du travail humain » par l’éditeur, et le sommaire détaillé de l’ouvrage
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PREFACE
Ce livre est passionnant en ce sens qu’il est une expression, rare dans notre pays, de l’articulation réussie entre l’action et la pensée. Ni récit d’expériences ni traité théorique, il est les deux à la fois. Michel Adam part de ses différentes pratiques et expériences militantes et professionnelles, les modélise et les confronte à nouveau à la pratique. Notre auteur se situe dans une démarche empirique d’action-recherche-action dont je me sens proche.
Je me sens d’autant plus en phase avec ce « pragmatisme conceptuel », celui qui propose des « concepts opératoires », que mon propre parcours rejoint souvent celui de Michel Adam. Depuis vingt-cinq ans, nous nous sommes (très) régulièrement croisés aux plans professionnels et bénévoles, en grande partie sur le terrain du combat pour la création d’activités et d’emplois de qualité. Devant la montée du chômage d’exclusion que notre génération a subi de plein fouet, des ruptures dans le tissu social qu’il a provoquées, nous avons cherché l’un et l’autre, chacun à notre façon, à investir le champ de l’innovation socio-économique, à expérimenter, à mettre en avant le territoire comme espace pertinent pour l’action. Nous nous étions construits sur la résistance à l’exploitation et à l’aliénation dans le travail. Il nous fallait apprendre à lutter contre l’exclusion de l’emploi qui génère un sentiment terrible d’inutilité au monde. Ce livre me semble clairement inspiré de ce double mouvement de résistance : à l’exploitation dans le travail d’abord puis à l’exclusion de l’emploi ensuite, unifié par un socle de convictions humanistes. Chaque fois que nous nous sommes retrouvés, Michel Adam et moi, sur les terrains du développement local, de la création d’entreprises, de l’insertion par l’activité économique, de la vie associative, nous avons vérifié que les leçons que nous tirions de nos expériences respectives nous rapprochaient et nous maintenaient dans une zone commune de vision du monde. C’est encore le cas dans ce livre et je me réjouis d’en faire la Préface car j’aime ces longs compagnonnages et fidélités entre des hommes.
Ce qui nous réunit, j’y reviendrai, s’inscrit dans une énergie commune pour « ré-enchanter le monde ». Qui a entendu Michel Adam sur une tribune lors de prise de parole publique a été frappé par la quête concrète d’un monde meilleur qui l’anime et qui caractérise la jeunesse d’esprit. Mon ami Claude Alphandéry, octogénaire à l’esprit d’une vivacité incroyable et à l’engagement citoyen inépuisable, auteur d’un merveilleux récit autobiographique, Vivre et Résister, reste l’un des plus jeunes militants de l’insertion par l’activité économique. Michel Adam s’inscrit en quelque sorte dans la lignée des Claude Alphandéry, des Bertrand Schwartz, des Patrick Viveret, dans laquelle je m’inscris également, de ceux qui ne se satisfont pas de l’intériorisation des contraints du monde tel qu’il est, de ceux qui cherchent dans l’action des marges de manœuvres, qui veulent « vivre, résister et entreprendre ».
Je structurerai les réflexions que m’inspire cet ouvrage autour de quatre sujets qui prolongent le livre et ouvrent des pistes de discussions :
– le nécessaire renouveau de l’éducation populaire ;
– la reconnaissance des entrepreneurs sociaux ;
– la recherche de nouvelles alliances de productions d’utopies réalisables ;
– le besoin de nouveaux indicateurs de mesure des richesses.
Ce livre est un acte d’éducation populaire, par son double effort pédagogique et critique. Michel Adam nous prend par la main pour rendre plus clair « en séparant ce qui est confondu et en reliant ce qui est séparé » selon les beaux titres des chapitres du livre. Ainsi ce livre nous sort-il par sa clarté de la confusion du travail et de l’emploi, confusion dans laquelle la France est engluée depuis trente ans, et que les débats sur l’articulation entre chômage et réduction du temps de travail n’ont pas contribué à clarifier.
Rendre compréhensibles les mots, et les idées derrière eux, au plus grand nombre, est indispensable au débat démocratique. Développer l’autonomie critique est la base d’une vraie éducation populaire. De ce point de vue, l’expérience d’Alternatives économiques à laquelle j’ai eu l’honneur de participer au cours des vingt-cinq dernières années est une magnifique expérience d’éducation populaire, de lisibilité et d’esprit critique, proche de ce livre. Car Michel Adam ne se contente pas d’expliquer, il requestionne, sans tabou. J’ai été frappé de ce que l’auteur n’hésite pas à prendre des distances avec la pourtant très respectable Hannah Arendt, considérée comme élitiste dans son approche du travail et de l’activité. Qu’on soit d’accord ou non, il est stimulant de re-questionner, de vider le panier des concepts, fussent-ils produits par nos grands auteurs !
De même, l’auteur se livre à une remise en cause de l’idée commune d’« employabilité », concept de ségrégation sociale, qui ne saurait passer à la légère dans le langage courant. L’acceptation d’une séparation du monde entre les employables et les inemployables est un renoncement démocratique, une défaite de l’humanisme. Être inemployable serait être inutile au monde ? selon l’expression de Geremek. Comme le chante Félix Leclerc, « le meilleur moyen de tuer un homme, c’est de le payer à ne rien faire ». La distinction entre travail et emploi reformulée par Michel Adam permet un devoir de vigilance. Ainsi parce qu’il est pédagogue (ses nombreux schémas en attestent) et critique, Michel Adam re-nourrit l’éducation populaire.
Or ce serait un formidable enjeu politique que de lancer un grand chantier de renouveau de l’éducation populaire : reformuler la doctrine, réinventer le brassage social, créer de nouveaux lieux, utiliser les outils de communication interactive. Le concept d’éducation populaire apparaît à tous comme ringard alors qu’il est profondément moderne et nécessaire. L’éducation populaire est une école de brassage social qui nous fait cruellement défaut, un centre d’apprentissage des responsabilités, un lieu où pourraient s’inventer de nouvelles articulations entre l’individu et le collectif. Michel Adam apporte sa pierre à cette nouvelle éducation populaire. Qu’il en soit remercié.
Un deuxième mérite de ce travail (cette somme !) de Michel Adam, est de nous faire sortir du dilemme chômage-pauvreté, que le secrétaire d’État américain au travail, Reich, avait formulé ainsi il y a quelques années : « Les Européens ont choisi le chômage, les Américains ont choisi la pauvreté ».
La proposition de Michel Adam d’une écologie du travail qui prolonge celle de mon ami Jean-Baptiste de Foucault pour « un plein emploi de qualité » est une approche stimulante, qui rejoint bien la distinction emploi/travail explicitée par l’auteur. Les perspectives actuelles du marché de l’emploi en France et en Europe rendent sans doute possible, compte tenu des évolutions démographiques, cette dimension écologique du travail. Au fond, le développement durable consisterait à articuler une écologie du travail et des produits du travail écologiques !
De ce point de vue, la question de la recherche de nouveaux indicateurs que propose Michel Adam dans le prolongement des travaux de Dominique Méda ou de Patrick Viveret est fondamentale. Un taux de chômage ne mesure absolument pas un niveau de qualité de travail. Le développement des emplois de services à la personne pose bien cette question : d’un côté, un volume important de créations d’emplois ayant une vocation de métiers relationnels, impliquant une approche de la qualité. De l’autre, des emplois souvent à temps partiel, sous-rémunérés et féminisés dans le mauvais sens du terme. La création d’emplois n’est pas par nature un enrichissement du travail.
Le concept de Responsabilité sociale des entreprises (RSE) évoqué par l’auteur, et qui me paraît un concept utile et productif, notamment par la théorie des parties prenantes qui le sous-tend, devrait être appliqué à l’objectif d’emploi de qualité, ou d’écologie du travail. Cet objectif concerne en effet les actionnaires, les salariés, les clients, les fournisseurs et la communauté dans son ensemble. L’écologie du travail concerne ainsi nettement les mouvements de consommateurs.
Un troisième mérite du livre, ou le troisième enjeu qu’il me donne envie de soulever, est celui de ce que j’appelle « nouvelles alliances d’utopie réalisable ». La question du plein-emploi, de l’écologie du travail, de la responsabilité sociale, nécessitent de mon point de vue que soient nouées de nouvelles alliances entre des ailes innovantes du patronat, du syndicalisme, mais aussi du monde associatif, du monde de l’économie sociale. Au fond, de tous ceux qui font de l’homme la fin de l’activité économique et non un simple moyen, une simple ressource.
En 2006, s’est tenu à Lyon le premier forum pour un monde responsable, qui voulait sortir de l’opposition stérile entre Davos (tout économique lucratif) et Porto Alegre (tout social redistributif). À ce forum du monde responsable, patrons, syndicalistes, ONG, pouvoirs publics ont débattu de manière passionnante pour rechercher de nouvelles alliances de projets. Lorsque Mohamed Yunus et Danone concluent un accord pour fabriquer des yaourts au Bengladesh en mobilisant l’épargne des salariés français et le microcrédit de la Grameen Bank, on voit se profiler de telles alliances. Michel Adam, parce qu’il a travaillé dans plusieurs mondes économiques et sociaux, me semble être un bon artisan de ces nouvelles alliances, notamment dans sa terre de Poitou-Charentes, qui a inventé le dialogue social territorial. Lorsque, dans le Nord, se retrouve dans ARDENSE, une association de chômeurs, des syndicalistes, des réseaux locaux de patrons, pour fabriquer ensemble des entreprises d’insertion, s’inventent de nouvelles alliances. La société française est incroyablement cloisonnée et productrice de préjugés. Sa remise en mouvements nécessite de décloisonner et de se rejoindre sur des projets concrets. Le monde des associations 1901 et celui des entreprises continuent à se regarder en chiens de faïence, à se focaliser sur la concurrence déloyale, alors que l’essentiel est ailleurs, dans les partenariats qui peuvent se nouer entre ces mondes. Quand une grande banque s’engage à faire en sorte que ses futurs retraités s’engagent dans l’ADIE comme bénévoles pour aider des rmistes à créer leur emploi, on crée de la valeur sociétale.
Enfin, je voudrais parler des entrepreneurs sociaux, auxquels l’expérience de l’insertion par l’activité économique de Michel Adam fait référence. Comme fondateur de la boutique de gestion Épicentre adossée à la SCOP Épiscope, ou comme responsable fondateur du réseau IRIS, Michel a contribué à l’émergence de l’idée de l’entrepreneuriat pluriel. Je me sens totalement en phase avec lui. On a longtemps laissé exclusivement aux entrepreneurs de capitaux le monopole de l’expression sur l’entrepreneuriat, installant l’idée fausse que le profit serait le seul moteur des entrepreneurs. Il est des tas de façons d’entreprendre et on peut aussi le faire en poursuivant des objectifs d’intérêt général ou d’utilité sociale. L’entrepreneuriat social définit des initiatives privées d’intérêt collectif.
Michel Adam en témoigne. Il reste beaucoup à faire pour faire reconnaître ces entrepreneurs du troisième type. Moi-même, comme ancien président de SCOP, ancien président du CJDES (Centre des jeunes dirigeants de l’économie sociale), et aujourd’hui directeur général délégué du Crédit coopératif, je me revendique complètement comme entrepreneur du troisième type. Ce qui caractérise selon moi cet entrepreneuriat, c’est la gestion de la tension entre un modèle économique et des finalités sociales. Rien n’est jamais acquis. Si l’on se préoccupe trop du modèle économique on perd le sens, mais si on oublie le modèle économique on est mort. Les expériences d’insertion auxquelles se réfèrent Michel Adam sont empreintes de la culture de la tension qui est l’essence même de l’économie sociale. Michel Adam, parce qu’il est un homme de conviction, un homme d’engagement, sait faire ce que l’actuel président de la MACIF, Gérard Andreck, résume en disant : « il faut reconvoquer le projet ».
Et c’est bien à cela qu’invite ce livre : reconvoquer le projet, à travers les pistes proposées par quelqu’un qui s’est coltiné l’épreuve de l’expérience, quelqu’un qui a été syndicaliste et employeur sans jamais trahir, en étant fidèle à l’unité d’une vision.
Merci, Michel Adam, pour ce bien bel ouvrage qui me semble ressortir plus de l’opera (création libre) que du labor (labeur) ou du trepalium (contrainte). Je souhaite qu’il donne lieu à de multiples débats, contradictions, enrichissements, un livre qui puisse vivre et résister, contribuant ainsi à alimenter une nouvelle éducation populaire.
Hugues Sibille
ancien délégué interministériel à l’Innovation sociale
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POSTFACE
Pourquoi, lorsque j’ai lu le titre, j’ai pensé « guerre et paix » ?
Travail et Emploi. Guerre et Paix.
La volonté de lier vie personnelle et vie collective, pour un militant syndical, pose toujours question. Le militantisme a longtemps été refus de soi. Il cultivait un certain « missionnarisme », une martyrologie. On pourra toujours, sourire ou reprocher le côté personnel, « l’égocentrisme » de la démarche appuyée par de nombreuses références qui s’appuient sur une histoire et un parcours. Nous ne pouvons les uns et les autres nous cacher derrière notre petit doigt. Il faut être soi pour être avec les autres et en même temps affirmer les bases d’une morale ancienne fondée sur « l’économie de l’échange - don ».
Dans ce livre, l’auteur se donne. Il s’expose en mettant à jour tout ce qui a fait racine. Il se jette à l’eau, il veut nouer les fils, réconcilier ce que notre histoire moderne s’est ingéniée à diviser. Pour cela il renoue les fils de sa propre histoire. Tous les militants, toutes les sociétés sont affrontés au temps, à la fuite inexorable d’un temps qui nous enferme. Il prend le pari de le libérer. De le raisonner.
Ce sont les déterminismes, économiques, culturels, psychologiques, sociaux… qui nous laissent terriblement seul, les déterminismes idéologiques et politiques qui font de nous des petits soldats. Reprendre et flécher l’histoire du travail et de l’emploi, comme il est fait dans ce tome 1, fait appel à notre liberté.
La liberté de conscience, c’est la liberté de choix assumé…nous pouvons faire mieux que ce que nous proposent tous les modernes relativistes. Comment oublier que l’émancipation fût le maître mot de nos formations militantes !
L’élargissement des terrains de luttes et de propositions, qui ne sont plus centrées que sur le travail mais sur notre survie elle-même, doit nous aider à sortir des ornières de la lutte des classes au profit d’une minorité. Le lieu de vie devient plus important que le lieu d’emploi. Ce dernier nous a fait quitter nos territoires, nos racines. Nous ne reviendrons pas en arrière, mais nous avons un immense effort à faire pour réunir toutes les écologies. Faire société.
Il s’agit de réconcilier le verbe et l’action tout en affirmant que ceux qui savent, c’est ceux qui font. C’est la promesse qui nous est faite.
Comme secrétaire régional de la CFDT et bien que je partage nombre de ses lectures et de ses références, la route de Michel Adam et la mienne n’ont pas forcément coïncidé. Tout comme celle du syndicalisme et du mutualisme. La CFDT en particulier, celle de Poitou-Charentes a depuis fort longtemps engagé un combat contre l’exclusion. Substituant l’exclusion à l’exploitation, comme première agression faite aux plus démunis. Moins « démunis » d’ailleurs - pourquoi le seraient-ils plus que d’autres ? - que désintégré par une culture de la force, de la violence et de la dépossession. Pour l’exemple, James Renaud, trésorier de la région CFDT, est co-fondateur d’IRIS et nous sommes encore nombreux, y compris dans les luttes actuelles, à farouchement défendre tous les salariés, même au chômage... Notre slogan reste encore «l’emploi on y travaille ».
Nous nous sommes engagés sur des voies qui faisaient bouger les lignes : dialogue social territorial, centre de ressources des groupements d’employeurs, négociation…Nous avons privilégié le bien commun et l’intérêt général. Il y a donc des convergences fortes avec les ouvertures que propose Michel Adam. Les groupements d’employeurs en particulier mais aussi tout ce qui pourra faire plateforme. Pour que les responsabilités et les compétences convergent dans l’intérêt de tous.
Syndicalisme et mutualisme sont affrontés aux mêmes questions. Les valeurs de départ se sont noyées dans les institutions. De l’exclusion nous sommes passés aux exclus et la tentation est grande d’aller vers les extrêmes en lieu et place de se poser les questions de notre propre fonctionnement. En excluant on s’exclut soi-même. Nous avons le devoir de construire ensemble un autre avenir. Ni fusion, ni réconciliation… autrement. Ni contre pouvoir, si semblable au pouvoir, mais volonté de faire fonctionner la démocratie qui ne sera jamais un produit fini.
Je ne vois qu’un contexte de référence qui permet de mieux comprendre cet engagement qui nous est commun. Nous sommes dans une situation identique à celle des ouvriers de la fin du XIXéme début du XXème, embauchés en masse dans les usines et rejetés par les corporations de métiers fortes de leurs mutuelles qui, se protégeant de manière fort élitiste, oubliaient les données universelles en méprisant littéralement ceux qui « s’excluaient » en allant travailler pour un patron. Les corporations ont tué, non seulement la solidarité mais aussi les métiers. L’un ne va pas sans l’autre. Le refus, voir le mépris des petits boulots, procèdent de la même démarche. Les antis et les nantis se confortent, se renforcent, les uns les autres.
Dans le même temps, les révolutions française, soviétique ont rapidement ignoré et tué ce que le peuple leur avait apporté. Le « social » peut aussi se construire, sinon contre les plus démunis, en tout cas, sans eux. Les dérives des mouvements sociaux de ces 15 dernières années ne font que confirmer cette intuition… et pourtant le social et l’entreprise sont certainement dans un siècle de guerre ce qui a permis de faire grandir l’humanité, le vivre ensemble.
La démocratie moderne, celle qui inclut emploi et travail pour tous, repose sur trois piliers : le suffrage universel, une administration compétente, et des acteurs responsables engagés et reconnus. Le tout doit fonctionner ensemble. Il faudrait de ce point de vue, pour notre génération, écrire comment nous sommes passés de l’autogestion à la démocratie participative.
La suite du travail de Michel Adam le dira, nous sommes toujours en tension entre une vision universaliste du monde, défigurée par les idéologies, et une vision du développement personnel, que l’individualisme marchand et consumériste, réduit à tel point que la science et le progrès technologique dictent leur loi à l’humain. Il faut aller encore et encore sur le terrain. Défricher la place du troisième pilier, celui de la société civile.
Le diktat de l’économie, du produit intérieur brut masquent le travail de fourmi réalisé avec celles et ceux que je qualifierais « d’alterlocaliste ». Ce travail doit permettre de partir à leur recherche. De mettre en avant ceux et celles qui ont coopéré, refusé l’ordre établi.
Au bout du compte le collectif a été essentiel à l’épanouissement des personnes. Son problème c’est quand il s’aperçoit que les personnes, défendant leurs acquis individuels, ne renvoient plus l’ascenseur.
Nous pouvons nous poser la question de savoir si la démocratie n’est plus qu’un système dominé par les conflits d’intérêts et la raison du plus fort.
Pour André Gorz, dans Lettre à D., « l’écologie devenait un mode de vie et une pratique quotidienne sans cesser d’impliquer l’exigence d’une autre civilisation ». C’est ce qu’il y a en creux de ce premier tome. Dans ses sources, ses références puisées dans la pratique et dans l’histoire moderne du monde du travail, ce premier tome jette les bases, les fondations, d’une reconnaissance encore plus poussée de ce qui fait l’originalité, l’identité profonde de la région Poitou-Charentes : une dynamique cachée qui réconcilierait « le désir demeuré désir » - René Char - et le désir d’avenir.
Nous sommes au cœur d’une révolution systémique voire, comme certains commencent à l’affirmer ici et là, anthropologique. Au moment où justement il s’agit de vivre pleinement cette tension entre sens social et liberté individuelle, pour transmettre mais aussi pour préparer nos sociétés aux vieillissements assumés et au renouvellement des générations, le travail de connaissance et de raison de Michel Adam va permettre de mieux comprendre et nous transformer.
Émancipation !
France Joubert Fondateur du dialogue social territorial
Président du Centre Européen de Ressources des Groupements d’Employeurs
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Présentation du livre « Pour une écologie du travail humain » par l’éditeur
« Séparer ce qui était confondu, relier ce qui était séparé. Suivant ce conseil d’Edgar Morin, l’auteur invite à une nouvelle approche du travail puis de l’emploi. Revisitant le sens des mots, il met à nu des rapports surprenants.
L’emploi s’instaure comme un contenant du travail. Véritable peau sociale du travail et du travailleur, il peut tour à tour l’étoffer ou l’étouffer... Le travail devenu un contenu, d’autres contenants se révèlent : tous les apprentissages, l’éducation, la vie domestique, la vie collective, les loisirs et toutes les situations où nous sommes en travail.
Le projet d’une écologie du travail humain se fonde dans cette reconstruction du travail objet vital et complexe, univers de sens, et de l’emploi, univers de l’équité recherchée, et de leur entrelacement.
Puissant ingenium bio-physique et social, le travail engendre trois piliers majeurs de la société : la « richesse », l’entreprise et l’emploi. Un créateur d’entreprise transforme le travail en emploi, et crée la « richesse » qu’un second livre explorera…
Le travail est malade de l’emploi, de nouveaux remèdes s’imposent pour supprimer le chômage de longue durée, ce tsunami social. L’auteur analyse les propositions des dernières années et propose une solution innovante… déjà amorcée ! »
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Michel
ADAM ingénieur ENSCP, est co-fondateur des Boutiques de
Gestion, du Bilan Sociétal du CJDES et du réseau
IRIS des structures d’insertion par l’activité
économique (IAE). Il est directeur émérite
du CREAHI, il enseigne à l’Université de
Poitiers. Membre du réseau MCX-APC pour la modélisation de la complexité, animé par Jean-Louis Le Moigne et Edgar Morin, Michel Adam est Coprésident de la CPCA Poitou-Charentes, qui rassemble le monde associatif, il a créé la Cordination des Initiatives Locales pour l’Emploi (CILE) qui fait coopérer l’I.A.E, les Boutiques de Gestion et les Groupements d’employeurs. |